Voilà un art subtil, ancestral, presque théâtral, mêlant habileté oratoire, danse du verbe, et esquive de l’essentiel.
On pourrait dire que c’est un peu comme l’escrime de salon , beaucoup de gestes, peu de sang, mais l’illusion d’un duel épique.
Déroulons ensemble le parchemin de cette technique, comme on déroulerait les secrets d’un vieux grimoire politique .
1. L’art de répondre sans répondre
Le politicien chevronné ne répond jamais directement à la question.
Il prend l'élan de la question pour rebondir vers son message, comme un judoka des mots.
On lui demande :
« Allez-vous augmenter les impôts ? »
Il répond :
« Ce qui est important aujourd’hui, c’est la justice sociale et le soutien aux familles. »
But ?
Planter une graine dans l’esprit sans s’enraciner dans le sol glissant du réel.
2. La reformulation salvatrice
Technique de grand sage : reformuler la question pour en changer le sens.
On lui dit :
« Avez-vous échoué sur ce dossier ? »
Il répond :
« Ce que je crois, c’est que nous avons fait face à un défi historique, et que nous avons su y répondre avec responsabilité. »
Traduction ?
“Non, mais je ne le dirai pas comme ça, parce que les mots ont des oreilles.”
3. L’anecdote qui touche le cœur
Ah, le petit récit personnel…
souvent fictif, mais toujours efficace .
« Je me souviens de cette mère de famille, à Limoges, qui m’a dit les yeux pleins d’espoir… »
Une larme pour attendrir, un exemple pour illustrer, et hop !
L’émotion remplace la réflexion.
4. L’ennemi commun comme diversion
Quand le sol devient glissant, le politicien montre du doigt un ennemi plus gros .
« L’Europe, la crise, l’héritage des précédents… »
En philosophie politique, c’est l’usage du bouc émissaire, dans la tradition de Girard.
Très efficace pour détourner la colère du peuple sans en assumer la cause.
5. La promesse floue, comme un mirage dans le désert
Jamais trop précise, jamais trop engageante.
On parle d’horizons, d’objectifs, de plans ambitieux.
On promet le futur sans date de livraison.
Un peu comme un poète qui promet la lune, mais sans fusée.
6. Le langage chiffré
« 2,4 % de croissance, 3,8 milliards d’euros d’investissement, 14 000 créations d’emplois »… Le chiffre rassure. Il donne l’illusion de la maîtrise.
Peu importe que personne ne sache ce que ça veut vraiment dire.
7. L’attaque ad hominem déguisée
« Je ne veux pas faire de polémique, mais je constate que certains préfèrent critiquer plutôt que proposer. »
Un coup d’épée dans l’eau, mais qui éclabousse juste assez.
8. Le sourire, l’élégance, la posture
Parce qu’en politique, la forme prime souvent sur le fond.
Un costume bien taillé, un sourire tranquille, une posture assurée… et même si les mots ne veulent rien dire, on les écoute.
C’est le théâtre antique sur la scène moderne.
En résumé…
La technique du politicien est un mélange d’illusionnisme verbal, de rhétorique calculée, de poésie opportuniste et de stratégie.
C’est l’art de parler fort sans en dire trop, de séduire sans s’engager, de naviguer dans les eaux troubles sans jamais mouiller sa chemise.
Mais attention !
Un peuple éveillé voit au-delà du verbe, et les masques, un jour, tombent.
Alors, pour chaque illusion, il faut aussi un peu de vérité, sinon… la scène se vide.
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