L’entretien consacré à Thomas Büchi, maître charpentier suisse et figure engagée dans la reconstruction de Notre-Dame de Paris, dévoile un artisan autant passionné par le bois que par l’héritage symbolique des bâtisseurs médiévaux.
Connu pour son rôle dans la restitution de la charpente de la cathédrale après l’incendie de 2019, Büchi apparaît ici comme un témoin privilégié d’un chantier hors norme, mais aussi comme un passeur d’idées singulières.
Auteur de Fragments de lumière.
Sur la voie ésotérique des bâtisseurs, il revendique un dialogue entre géométrie, tradition et quête intérieure.
Ses propos, relayés notamment par NTD France, Charpente-Concept et Buzz Panda, dressent un portrait inattendu du métier : un travail du bois nourri de spiritualité.
Le nombre d’or, colonne invisible de l’architecture sacrée
Au cœur de son récit, Büchi met en avant le nombre d’or, cette proportion mathématique (≈ 1,618) que l’on retrouve dans l’art, les cathédrales, certaines pyramides ou la nature elle-même.
Pour lui, il ne s’agit pas d’un simple outil esthétique , c’est une grammaire universelle, une façon de relier l’œuvre humaine à un ordre cosmique.
Selon lui, les bâtisseurs médiévaux avaient intégré ces lois harmoniques dans la conception des grandes architectures religieuses.
Il voit dans Notre-Dame une géométrie pensée pour élever autant l’esprit que les murs.
Une transmission ancienne, teintée d’ésotérisme
Le maître charpentier évoque également l’existence d’une tradition de savoirs géométriques, transmise de siècle en siècle.
Dans sa lecture, les charpentiers médiévaux, les compagnons, voire certains ordres anciens auraient conservé une forme de connaissance symbolique.
Il cite un volumineux dossier historique de 2 500 pages consacré à Notre-Dame où apparaîtraient des correspondances géométriques frappantes, comme l’inclinaison d’une charpente rappelant des proportions pyramidales.
Ces affirmations séduisent par leur poésie, mais reposent sur des interprétations personnelles plutôt que sur un consensus scientifique.
Des monuments comme points d’énergie
Plus surprenant encore, Büchi défend l’idée que certains édifices seraient situés sur des lignes énergétiques, comparables à des méridiens terrestres.
Il mentionne des cartes géobiologiques et l’intuition des anciens bâtisseurs, capables selon lui de “ressentir” ces flux pour y ancrer leurs structures.
Là encore, le discours navigue entre savoir traditionnel, croyances ésotériques et imaginaire symbolique.
Réconcilier science, artisanat et spiritualité.
L’artisan critique l’architecture contemporaine, trop fonctionnelle à son goût, et plaide pour un retour à une conception “habitée”, où la divine proportion guide la main autant que la règle.
Dans cette perspective, reconstruire Notre-Dame devient un acte presque rituel , retrouver une unité intérieure, renouer avec la “voie des bâtisseurs”, accorder la main à l’esprit.
Des zones d’ombre qui suscitent le débat
Certaines de ses affirmations, réseaux énergétiques, géométrie sacrée, lien entre charpentes et proportions pyramidales, restent sujettes à caution.
Plusieurs experts du patrimoine rappellent que la reconstruction d’un monument classé repose d’abord sur une méthode rigoureuse, des archives précises et des contraintes techniques bien réelles.
L’approche de Büchi où architecture et spiritualité se confondent, fascine certains et inquiète d’autres.
Un témoignage qui interroge notre rapport au patrimoine
L’entretien n’en demeure pas moins captivant.
Il révèle une facette méconnue de la reconstruction de Notre-Dame , celle d’artisans qui voient, dans le geste millénaire, plus qu’un travail ,une continuité.
Il rappelle que les cathédrales ne sont pas seulement des prouesses techniques, mais des symboles habités, capables de porter des imaginaires multiples.
Et il pose une question qui dépasse son seul cas .
Reconstruire un monument, est-ce reproduire la pierre ou réapprendre le sens qu’on lui donnait ?
Cette interrogation ouverte et presque métaphysique, plane encore au-dessus des échafaudages de Notre-Dame, comme un fil tendu entre passé et avenir.
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