Fatigue démocratique, crise du sens, colère sociale , le désabusement français s’est installé comme un brouillard persistant.
Il ne s’agit plus d’un simple malaise, mais d’un état collectif, une lente érosion de la confiance envers les institutions, les élites et même la parole publique.
Selon le dernier baromètre du Cevipof, 73 % des Français estiment que la démocratie “ne fonctionne pas bien” et près de 80 % pensent que les responsables politiques “ne se préoccupent pas des gens”.
Cette fracture de la confiance, creusée par des décennies de promesses trahies, s’est amplifiée avec les crises , pandémie, inflation, climat, inégalités territoriales.
L’abstention record des dernières élections législatives a confirmé le divorce.
Près d’un électeur sur deux a choisi de ne plus choisir, préférant la distance à l’illusion.
Loin d’une simple lassitude civique, cette abstention traduit un retrait de consentement, une manière silencieuse de dire “non” à un système jugé verrouillé, insincère, confisqué.
Mais le désabusement n’est pas le nihilisme.
Car, à la marge du pouvoir, d’autres formes d’engagement émergent , entraide locale, mobilisation climatique, initiatives culturelles, médias indépendants.
Ce sont autant de tentatives pour retisser du sens là où l’État semble s’effacer.
Le désenchantement devient alors lucidité.
Moins de croyance dans les sauveurs, plus d’exigence de justice et de cohérence.
Ce scepticisme, loin d’être une faiblesse, pourrait bien être le socle d’une démocratie plus adulte, moins fascinée par la verticalité du pouvoir et plus attachée à l’intelligence collective.
“Les Français n’ont pas cessé de rêver, ils ont cessé de croire qu’on rêverait pour eux.”
Le désabusement, dans cette perspective, n’est pas un effondrement, mais une mue silencieuse , la transition d’un peuple désillusionné à un peuple lucide, prêt à reconstruire sur les ruines de ses illusions.
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