La Guadeloupe, terre de beauté et de contrastes, semble se débattre aujourd’hui entre deux mondes , celui du rêve tropical et celui du réel économique.
L’île vit d’un rythme lent, nourri par la chaleur, la mer et une certaine philosophie du temps.
Mais sous cette douceur, un malaise profond ronge le tissu collectif , le travail perd sa valeur morale, la rigueur s’efface derrière l’excuse climatique et la responsabilité devient un mot poussiéreux.
Ici, les contraintes sont nombreuses, dit-on.
Mais ce ne sont pas les contraintes qui paralysent , c’est le refus de les affronter avec discipline.
L’absence de ponctualité, les rendez-vous manqués, les chantiers interrompus au premier nuage, les bureaux vides à la veille des week-ends , tout cela ne relève pas du hasard.
C’est devenu un mode de vie.
La désinvolture s’est installée en système, parfois même en fierté.
On rit de nos retards comme d’un trait culturel.
Pourtant, il n’y a rien de drôle dans le déclin d’une exigence collective.
Le professionnalisme, lui aussi, s’étiole.
Certains secteurs se ferment à toute concurrence, transformant l’emploi en chasse gardée ,jobs, protégée au nom d’une appartenance locale.
Une solidarité mal placée, qui finit par nourrir le favoritisme et décourager le mérite.
Dans ce climat, ceux qui veulent faire mieux passent pour prétentieux et ceux qui demandent l’excellence deviennent gênants.
On préfère l’entre-soi à la compétence, la routine au risque, le confort à l’ambition.
Mais comment espérer transmettre une culture, un savoir, un modèle de vie, si l’on ne cultive plus la rigueur du geste, la fierté du travail bien fait ?
La culture ne se conserve pas dans les discours, mais dans les actes ,dans la précision d’un artisan, la ponctualité d’un enseignant, la persévérance d’un agriculteur.
Sans cela, l’héritage se vide de sens et la société perd confiance en elle-même.
Ce que vit la Guadeloupe n’est pas une fatalité, mais un choix collectif.
Un choix de facilité.
Et ce choix, s’il perdure, condamne l’île à dépendre toujours des autres, à subir plutôt qu’à construire.
On invoque souvent l’histoire, la colonisation, la métropole , autant de réalités qui pèsent, certes, mais qui ne peuvent justifier éternellement la démission du présent.
La rigueur n’est pas un mot d’importation.
Elle fut jadis au cœur même de la dignité créole ,celle des femmes et des hommes qui travaillaient sans relâche, non pour plaire, mais pour exister.
Rejeter la rigueur aujourd’hui, c’est trahir cet héritage.
L’avenir de la Guadeloupe ne dépend pas d’un miracle politique ou d’une aide extérieure.
Il dépend d’un sursaut moral , retrouver le goût de l’effort, de la ponctualité, du devoir bien accompli.
Non pas pour imiter un modèle étranger, mais pour honorer ce que l’île a de plus précieux , sa capacité à créer, à innover, à tenir debout face aux tempêtes.
Le jour où la rigueur redeviendra une valeur partagée , non plus une punition, mais un honneur , la Guadeloupe cessera de subir son destin.
Elle retrouvera la force d’écrire de ses propres mains, les pages d’un avenir autonome et digne. ..
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