Dans ce coin de l’histoire où se croisent la Vendée, la Commune et les querelles de famille au sein de la gauche française, il flotte une odeur de cendre et de papier imprimé.
Rien de neuf sous le soleil , les clivages d’hier ressemblent toujours à des miroirs antiques de ceux d’aujourd’hui.
En 1921, le paysage politique français se déchirait comme un vieux drapeau trop tendu.
Le Congrès de Tours venait de scinder la gauche en deux foyers rivaux.
D’un côté, la gauche dite “sociale”, héritière du mouvement ouvrier, nourrie aux luttes, aux syndicats, au souvenir tragique mais incandescent de la Commune de Paris.
Elle se reconnaissait dans le Parti Communiste naissant, dans l’idée farouche que le peuple , le vrai, celui des mains rugueuses devait tenir la barre.
En face, la “gauche bourgeoise”, celle qui avait troqué la blouse de l’atelier contre la veste des assemblées, plus réformiste, plus institutionnelle.
Elle restait dans la SFIO, se voyant comme gardienne d’un socialisme légaliste, parlementaire, davantage porté par les classes moyennes urbaines que par les paysans ou les ouvriers des faubourgs.
Là se logeait une tension vieille comme le mouvement social lui-même , l’âme révolutionnaire contre l’esprit gestionnaire.
La Vendée, en 1921, n’était pas le terreau le plus fertile pour ces rêves rouges.
Terre marquée par son passé contre-révolutionnaire, attachée à ses traditions, ses paroisses, sa mémoire particulière des guerres civiles du XVIIIᵉ siècle.
Ici, les fractures politiques suivaient encore les sillons du temps long.
Pourtant, même ce département apparemment immobile recevait les échos du Congrès de Tours, comme une houle lointaine qui finit toujours par toucher la côte.
Les rares militants socialistes s’y débattaient avec la même question , suivre le souffle révolutionnaire ou rester dans la voie graduellement réformiste ?
La Commune, elle, planait comme un fantôme bienveillant et tragique.
À Paris, elle avait incarné la tentative d’un peuple qui gouverne par lui-même.
Pour l’aile sociale et communiste, c’était une étoile du matin.
Pour la gauche bourgeoise, un avertissement , la passion populaire peut éclairer, mais aussi brûler.
Il reste de cette période une leçon discrète.
Chaque famille politique porte ses ombres et ses feux et les étiquettes “sociale”, “bourgeoise”, “réformiste”, “révolutionnaire” ne sont jamais que des raccourcis posés sur un paysage infiniment plus nuancé.
L’histoire, patiente, sourit souvent de nos catégories trop tranchées.
0 Commentaires
Pour commenter, pas besoin d’être inscrit sur le site.....