Quand le job encaisse et que le travail trinque !



Le mot « travail » a pris un coup de vieux, comme un vieux soldat qui continue malgré tout de porter l’uniforme républicain. 

Il sent la sueur, la dignité, la cotisation ,ce geste discret qui alimente les routes, les hôpitaux, les retraites, bref, le grand chaudron commun. 

Travailler, c’était mettre son morceau de bois dans le feu collectif.

Puis a débarqué son cousin branché, le « job ». 

Un petit air de start-up, un parfum de flexibilité, une feuille de paie qui clignote comme une guirlande de Noël, mais derrière, pas de cotisation, pas de solidarité, pas de filet. 

Juste une poignée d’euros jetés comme des cacahuètes à un singe savant.

Le job paye. 

Le travail, lui, fait vivre le pays. 

Entre les deux, on s’y perd un peu.

Dans les cafés du matin, on entend souvent la rengaine : « Le travail ne paye plus ! »

Ce n’est pas faux, mais ce n’est pas tout à fait vrai.

Le travail ne paye plus pour ceux qui travaillent. 

Le job, lui, paye très bien ceux qui payent moins que les autres. 

C’est le petit tour de magie moderne, le salaire tombe, mais l’hôpital peut attendre , le budget est propre, mais les routes se fendent , l’individu gagne, mais la société s’effrite.

Et l’on nous dit ensuite qu’il faut être souple, agile, « adaptable ». 

Une gym douce vers la précarité.

Pendant ce temps, dans les bureaux où l’on décide, des Michel Morin professionnels, il y en a partout, il suffit de changer le nom, inventent des concepts avec des lettres qui sonnent bien, du style « optimisation de charges.

 ». Traduction : cotiser moins, profiter plus, puis faire de grands discours sur l’effort national en consultant sa montre suisse.

La satire devient presque superflue : la réalité s’en charge très bien.

On remplace le mot « travail » par « job » comme on troque une machette contre un cure-dent pour défricher une forêt. 

On se félicite d'avoir modernisé le langage. 

On oublie qu’un pays ne tient pas avec des slogans, mais avec des épaules solides et des mains qui construisent.

Un vieux proverbe créole disait que « tout moun ka dansé, mé sé pa tout moun ka payé lé mizik ».

La musique tourne toujours.
Certains dansent.
D’autres payent.

Et quelque part entre les deux, le citoyen regarde la scène avec ce mélange de tendresse et d’agacement qui caractérise les peuples lucides, ceux qui savent que l’avenir se forge sur un simple geste , contribuer.

La suite s’écrit au choix : en job ou en travail.

Mais l’histoire retiendra celui qui nourrit la communauté, pas celui qui l’utilise.


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